Les motos sont chargées, on a bu un petit café et le départ est donné à neuf heures.

C’est parti !

Euh ! oui, mais là pour le moment on est encore à côté de Toulouse et il y a encore toute la route à faire jusqu’à Cadaqués et le Cap de Creus.

On espère y être sur les coups de quatorze heures.

Pas de temps à perdre ! On attaque les petites routes, celles avec des virages qui font du bien aux flancs de pneus et nous traversons Carcassonne (11) puis arrivons au petit village de Lagrasse (11).
C’est l’heure de la pause café. Le soleil est au rendez-vous, la chaleur aussi. Tout se présente bien.

Nous repartons en direction des gorges de l’Orbieu quand soudain la route est barrée. Après discussion avec les gens du coin, il apparait que la route est barrée pour un quart d’heure, le temps de laisser passer les participants d’une course de caisses à savons.
Et effectivement, nous les voyons débouler à tour de rôle d’une petite route sur la gauche et traverser devant nous pour se jeter sur une voie à droite assez étroite.
A cette occasion nous apprenons que c’est un championnat officiel et qu’il existe aussi un championnat de France de caisses à savon.


Les barrières se lèvent et nous reprenons notre périple.

Petites routes, Tuchan (11), virages, Estagel (66), pique-nique. Le temps défile plus vite que les kilomètres. La faute à notre trop grand appétit de virages.
Si nous voulons arriver au Cap de Creus pas trop tard, il va falloir qu’on accélère un peu le rythme et qu’on laisse tomber les routes touristiques.

Les sandwiches engloutis, nous traçons en direction de Millas (66) et décidons de tirer au plus vite vers Cadaqués.
Le Boulou (66), le Pertus (66), la Jonquera (ESP), Rosas, par la nationale. C’est d’un ennui terrible mais c’est le plus rapide.
On attaque la route vers Cadaquès vers 14h30. Pas trop mal, on est dans des temps raisonnables.
Au loin, nous apercevons un barrage de police. Un contrôle ? Ben non ! Route barrée. Un policier nous explique qu’un accident a eu lieu sur la route et que celle ci est fermée pour encore une demi-heure.
Attente ? Détour ? Un œil rapide au GPS nous informe qu’un établissement de vente de boissons est à proximité. Ni une ni deux, nous attendrons là !
Après avoir fait tomber la moto sur le parking en la manœuvrant, je me gare proprement et file nous commander “dos cervezas, por favor”. Une fois désaltérés et un peu reposés, nous reprenons la route.
”Caramba !” Toujours bloquée !

Deux options s’offrent à nous. Soit on commence l’ACT maintenant en rejoignant la trace au plus près de nous soit on fait le détour pour nous pointer au départ “officiel” au Cap de Creus avec photos et tout et tout, histoire de dire qu’on y était.
Unanimement nous décidons d’aller au Cap de Creus. Ce qui implique un détour conséquent pour éviter le barrage de police. Qu’à cela ne tienne, nous avons le temps et aucun horaire à respecter. De plus, ce soir ce sera bivouac.

Nous faisons le détour par Llança et Port de la Selva puis arrivons sur Cadaqués. Petit jardinage dans les ruelles malgré le GPS et enfin nous voici au Cap de Creus. Photos de circonstances.

Il est dix-sept heures. Nous attaquons enfin la trace de l’ACT. Ou presque !

Nous nous rendons compte que finalement il nous faut de l’essence et de la nourriture pour ce soir ! Retour à Llança. Essence, “supermercado” et nous partons pour de vrai.

Je connais bien la route de Llança à Port de la Selva. C’est une galère sans nom. La route est un billard, tortueuse à souhait mais tout le temps bondée et il est impossible de doubler. Quand il fait trente cinq degrés à l’ombre, c’est une torture.
Et nous en sommes à notre troisième passage de la journée. Je n’en peux plus. Je suis légèrement sur les nerfs. Ca ne roule pas, il fait chaud, l’heure avance et pas nous, il y a du monde partout ! Au secours ! Sortez moi de là !

J’en suis là de mes pensées dans mon casque quand arrive la bifurcation salvatrice, celle qui nous éloigne de la civilisation et de la foule automobile. Je suis sauvé !

La route doit nous emmener jusqu’à la Jonquera (ESP) en traversant les Albères. Nous montons vers un petit col tout mimi avec vue sur la Méditerranée, sur un goudron absolument lisse, avec des virages tous plus jouissifs les uns que les autres. Nous faisons quelques pauses photos au passage malgré l’heure qui commence à être tardive.

Nous n’avons toujours pas de point de chute pour le bivouac mais le soleil se couche quand même assez tard et nous ne sommes pas plus inquiets que ça.

Lors de la descente du col nous commençons à emprunter les premiers chemins. Etroits mais faciles et roulants. Pour commencer le trip c’est bien. Et pour une fin de journée aussi. Mais la journée est loin d’être finie.

Nous passons la Jonquera et nous traçons vers Darnius puis Maçanet de Cabrenys en passant par les pistes qui longent le lac de Darnius-Boadella.
C’est tout sec, pas trop caillouteux et très joli.
Je me sens à l’aise malgré mon chargement et cela me rassure pour la suite. Ne pas avoir l’appréhension de la chute aide justement à éviter la chute.

Nous nous arrêtons en arrivant sur Maçanet de Cabrenys pour jeter un oeil au casque de Bertrand. Celui-ci a perdu une vis de maintien de la visière. Et comme nous ne portons pas de masque, cela risque d’être gênant avec la poussière des pistes.
Pendant que Bertrand s’affaire sur son casque, je réussis à faire tomber ma moto sur le rebord d’un trottoir. Deux cent cinquante kilos de ferraille qui s’affale cela fait un peu de bruit.
Nous relevons la moto, constatons qu’il n’y a pas de dégât et redémarrons. Ah ben non ! Il y a un dégât. Le pare-main droit s’est suffisamment déformé pour empêcher la rotation libre de l’accélérateur. Quand je tourne la poignée, elle reste coincée. Une sorte de régulateur de vitesse mécanique, quoi ! Sauf que moi, je n’en veux pas.
Je vais pour sortir les outils de ma sacoche et là je m’aperçois que ma bombe anti moustique, astucieusement rangée pas loin des outils, s’est complètement vidée. Tout mon matériel électrique de camping, rallonges, adaptateur, multiprise, baigne dans la citronnelle. Un vrai bonheur !
Je nettoie tout ça, redresse non sans mal le pare-main (à la base c’est prévu pour ne pas se tordre, alors quand c’est tordu, c’est dur à remettre en forme) et nous repartons vers notre lieu de bivouac.

Il fait nuit et il nous reste douze kilomètres de pistes pour arriver au col où nous planterons la tente. Nous n’avons pas le choix car nous sommes côté espagnol dans une zone de parc naturel où il est strictement interdit de bivouaquer. Il nous faut donc atteindre ce col pour repasser côté français où nous pourrons passer la nuit en toute légalité.

Nous montons les douze kilomètres à la lueur des phares, dérangeons malgré nous quelques vaches et chevaux baguenaudant sur la piste, passons la frontière de cinq mètres et plantons nos tentes. Il est vingt-deux heures et je roule depuis sept heures du matin. Il est temps de manger et dormir.

Demain nous nous organiserons pour planter la tente plus tôt. Du moins avant la tombée de la nuit.

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